Devenir professeur de français langue étrangère (FLE) et avoir son séjour financé par le Prince de Bavière

« Elle doit à peine avoir 20 ans. Elle est un peu « schiki-miki » (bobo munichoise) et elle prend des cours de français ET d’anglais en plus de l’école depuis l’âge de 8 ans. Elle a dû en voir passer des profs… Bref, elle pue la confiance en elle et moi, j’ai les mains moites ».

Voilà ce qui se passait dans ma tête le 5 mai 2011. J’avais l’impression d’être du mauvais côté du bureau. Elle était ma première élève.

Ce qui est amusant, c’est que c’est aussi avec elle que j’ai eu pour mon dernier cours 9 mois plus tard. Sauf que cette fois-ci, on n’a pas vu l’heure passer à s’entraîner à poser le bon geste sur la bonne expression courante (cf le langage corporel français selon les expressions courantes les plus utilisées).

A cette époque, j’étais à Munich, ni vraiment touriste parce que j’y étais déjà depuis quelques mois, ni vraiment expat’ installée, parce que je savais n’y rester qu’une année supplémentaire tout au plus. C’était un peu un voyage « moyen terme » pendant lequel, à l’instar de Rolf Potts, auteur de Vagabonding et de Where Marco Polo did not go, j’ai travaillé en tant que professeur de français langue étrangère.

Un job qui peut transformer votre expérience à l’étranger

C’est un moyen facile de gagner un peu d’argent.

Le meilleur moyen de découvrir un peu plus en profondeur une culture est à mon avis de rester quelques mois au même endroit et d’y travailler. Alors arrive un moment où fatalement, comme partout, il faut payer le loyer. Avoir de quoi s’acheter à manger n’est pas un luxe non-plus. Etre professeur de français langue étrangère est une bonne solution pour trouver du travail rapidement.

Aucune qualification particulière n’est demandée. Il faut simplement que la langue que vous enseignez soit votre langue maternelle. Avoir le diplôme FLE est complètement inutile et ne vaut sûrement pas le coût du papier sur lequel il est imprimé. Si vous n’avez aucune expérience de l’enseignement, l’école elle-même vous formera pendant 2 semaines (généralement non-payée) à l’issue desquelles vous aurez votre poste en freelance et serez payé en fonction du nombre d’heures que vous effectuez.

Voici quelques conseils pour avoir plus d’heures :

Ne travaillez pas en même temps que les autres.

J’ai remarqué que les autres profs de français n’aimaient pas travailler les week-end (le samedi) et les soir après 18h. J’ai donc rapidement accepté de couvrir les horaires du soir (18h-22h) et les samedis. A 22 heures, il est encore temps d’aller boire une bière en débauchant et avoir ses matinées, voire ses journées de libre peut être très avantageux pour visiter et découvrir un nouvel endroit, surtout en semaine. Quand les lieux sont envahis par les touristes le samedi, je travaille, et quand les pistes de ski sont libres le lundi, je peux pleinement en profiter.

Faites vous apprécier des standardistes

C’est eux qui vous appellent pour vous proposez un job, c’est à dire un nouveau cours avec un nouvel élève qui vient de s’inscrire pour au moins 20 heures. Faire un effort pour dire quelques mots dans leur langue est toujours bien vu.

Répondez rapidement au téléphone et rappeler systématiquement pour dire que vous avez bien eu le message, même si vous savez que c’est trop tard et que le cours a certainement déjà été donné à quelqu’un d’autre. Ils seront plus enclins à vous appeler en premier la fois suivante si vous montrez de l’intérêt et montrer que vous souhaitez davantage d’heures.

Et eux, tout ce qui les intéressent, c’est que vous résolviez leur problème facilement, à savoir trouver un prof disponible aux horaires souhaités par l’élève.

Faites vous apprécier des élèves

Ils remplissent un questionnaire de satisfaction. Pas de stress non-plus, vous ne risquez pas d’être viré à chaque heure mais les avis des clients comptent.

Alors pour que vos élèves vous aiment bien, c’est facile. Pas besoin d’être particulièrement sympa (surtout si les devoirs ne sont pas faits), ce qu’il faut, c’est incarner un cliché.

Ça ne marche peut être pas avec toutes les nationalités, mais pour le français, pas de problèmes. Les gens adoooorent la France… et le vin et les croissants. Devenez Marianne et vos élèves seront contents d’avoir une prof de français réellement française. Ca veut dire que vous aimez le pain, le fromage, les films en noir et blanc dans lesquels il ne se passe rien (mais « chics » et sophistiqués) et vous connaissez par cœur Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain.

Les gens se plaignent beaucoup que ce job est mal payé (comptez entre 15 et 22 euros par heure) mais si vous n’avez pas l’intention d’en faire votre métier mais que vous le voyez bien comme un moyen de voyager, vous pourrez largement rester sur la route quelques années.

Mais c’est surtout un bon job parce qu’il favorise largement les rencontres.

Comme vous, vos collègues ont un peu les mêmes centres intérêts que vous. Ils viennent des 4 coins du monde aussi et sont également avides de rencontrer de nouvelles personnes avec qui sortir.

Et Du côté des étudiants, on peut aussi faire des rencontres intéressantes. Je n’aurais sûrement jamais connu l’arbre généalogique de la famille de Bavière si je n’avais pas enseigné le chapitre 7 du niveau 1, consacré à la famille, à Tassilo von Bayern qui, à en croire l’arbre généalogique dessiné sur mon trop petit tableau, serait l’héritier de la couronne à la mort de son grand-père et à la suite de son père.

Et parce qu’on n’enseigne pas à 30 ados qui se fichent de ce qu’on raconte mais à des adultes qui payent le prix fort pour apprendre notre langue, que ce soit par nécessité professionnelle ou pur plaisir, on s’attache vite à eux, à leur mine frustrée et à leur accent ineffaçable.

Je ne veux pas manquer le prochain article qui m'aidera à me lancer en freelance, me construire une activité qui me passionne et à avoir une vie pas banale ! Merci de promettre de ne pas me spammer :)

Déjà 10 commentaires Ajoutez le votre

  1. Myriam Farenc

    Je vous remercie de piétiner aussi ouvertement les 4 ans d’études nécessaires pour être prof de FLE. S’il y a un master qui existe c’est bien que ça sert à quelque chose !

    Je ne dis pas qu’un non FlEiste n’est pas capable d’enseigner, pourvu qu’on maîtrise un minimum sa langue, les manuels sont plus ou moins bien faits et les guides pédagogiques également mais de là à dire que « le diplôme FLE ne vaut pas le papier sur lequel il est imprimé », vous y allez fort.
    Vous avez eu la chance d’être payé 15-22e/h mais ça tourne plutôt aux alentours du 7/12$ à l’étranger donc oui c’est mal payé car pour pouvoir voyager, encore faut-il pouvoir se payer le billet d’avion ou un retour en France de temps en temps!
    Alors quand on est mal payé et qu’en plus on se fait « piquer notre travail » par des gens qui n’ont rien à voir avec le FLE, ça énerve, forcément !
    Votre définition du contact avec les élèves est très juste mais ne dénigrez pas ce que vous ne connaissez pas.

    Cordialement. Myriam Farenc

    • Nas

      J’ai fait ce boulot pendant 3 ans sans diplôme FLE… De bons diplômes dans d’autres matières (dont deux en langues étrangères quand même….), une bonne maîtrise de sa langue maternelle et de l’enthousiasme ont largement été suffisants. Le reste n’est qu’adaptation aux circonstances et travail sérieux pour développer des compétences soi-même.

  2. Caro Hardy

    « S’il y a un master qui existe c’est bien que ça sert à quelque chose ! ». Pas la peine d’en lire davantage pour conclure que ce blog n’est pas définitivement fait pour vous. Vous ne voudriez pas lire l’article expliquant comment je suis devenue webdesigner.

    Bonne chance dans votre combat contre ceux qui vous volent votre travail alors que vous le méritez tellement plus que les autres.

    Et dommage que vous n’utilisiez pas votre longue expérience pour apporter un commentaire constructif pouvant aider les gens à devenir de meilleurs profs de FLE.

  3. Raquel

    Bonjour Caro,

    Ce que tu publies là m’intéresse particulièrement, car je suis en ce moment à Munich et je peine à trouver quelque chose dans mon domaine. Je suis historienne de l’art.
    Tu as postulé dans quelles écoles, si cela n’est pas indiscret…?

    Merci!

    Raquel

  4. Fanny Allen

    Bonjour Caro,

    Je rejoins effectivement ma collegue Myriam. Je ne sais pas trop dans quel type d’etablissement vous travaillez, probablement une ecole de langues privee.

    Etre payee 15/22 euros de l’heure, c’est assez utopique et c’est donner de mauvaises infos aux jeunes qui souhaitent partir a l’etranger pour y travailler. Vous etiez en Allemagne, ils payent probablement bien.

    Mais allez vivre en Amerique du Sud, en Asie, les salaires sont de l’ordre de 5-8 euros de l’heure, a peine de quoi payer un billet retour pour la France.Parfois a peine pour payer son loyer. D’ou la colocation quasi systematique.

    Ensuite, pas d’assurance medicale, pas de retraite. Tout est sous contrat local.

    Beaucoup d’etablissements type Alliance Francaise ou Lycees francais emploient des personnes issues du master FLE en priorite. Donc oui le diplome est utile.

    Les petites ecoles privees, qui ne sont la que pour le business, emploient un peu tout le monde. »Vous parlez francais, tres bien Mademoiselle, on vous recrute »

    Ce que vous decrivez dans votre article n’est pas representatif du monde du FLE. On dirait du telemarketting. Ce n’est peut etre qu’en Allemagne d’ailleurs…

    Je n’ai jamais ete appelee par une standardiste pour avoir un cours!! Vous travaillez dans une structure type « Acadomia » non?

    Avez-vous eu d’autres experiences a l’etranger en tant que prof de francais? Parce que les structures et les etablissements sont tres differents les uns des autres.

    Je pense qu’avant de generaliser une profession et un diplome, il est bon d’avoir differentes experiences pour pouvoir ainsi etre plus objective et eventuellement conseiller les gens.

    Vous devriez changer le titre et l’orienter sur « Comment enseigner le Francais dans une ecole de langues a Munich » ;-).

    Dans les nombreux etablissements ou j’ai travaille (AF, Universites, ecoles de langues), un peu partout dans le monde (Amerique du Sud, Asie, Mexique et aussi aux USA ou je reside dorenavant)en tant que prof de FLE issu d’un Master de La Sorbonne Nouvelle, je n’ai jamais vu pesronne avoir une formation en 2 semaines. Ce n’est tout simplement pas serieux.

    Votre article a du bon sur Munich. Mais ne generalisez pas s’il-vous-plait…

    PS: et oui, vous pouvez aussi etre amene en tant que prof de FLE, a donner des cours a 30 ados qui se fichent de ce que l’on raconte!!

  5. Caro Hardy

    Bonjour Fanny,

    Je comprends votre point de vue. Cependant 15 jours de formation sont parfaitement suffisants pour qu’une structure vous présente son matériel pédagogique et ses attentes en terme d’enseignement (il ne me revenait pas la charge d’établir un programme éducatif complet). Je suis par contre brutal envers moi-même en terme d’apprentissage personnel, tout comme vous ne vous êtes sûrement pas contentée du curriculum minimum exigé pendant votre master. Oui, ces écoles vous donnent une chance « parce que vous parlez français » mais elles ne se sentent nullement obligées de vous donner des heures si les gens ne sont pas satisfaits de vos cours ou que vous n’êtes pas compétent.

    J’étais bien payée entre 15 et 22 euros de l’heure. Et l’Institut Français recherchait à l’époque expressément des professeurs de français non-diplômés du FLE mais ayant justement d’autres spécialités à apporter aux étudiants (art et patrimoine dans mon cas). Ce n’est pas une utopie. Je comprends que ce ne soit pas un revenu qui vous satisfasse après 5 d’études, mais je parle ici de travail en freelance et non pas d’un CDI dans l’Education Nationale.

    Et en freelance, il existe un marché pour des cours à 6 euros de l’heure, tout comme il en existe un à 1000 dollars de l’heure (à l’instar de Michel Thomas qui a enseigné à des acteurs de Hollywood). Tout dépend bien sûr de ce qu’on a à offrir, du problème qu’on résout pour les clients qu’on cible et de son positionnement.

    Enseigner le français reste une activité facilement accessible pour ceux et celles qui souhaitent travailler tout en voyageant et je pense que tester reste le meilleur moyen de savoir si on veut en faire son métier et alors peut être y consacrer 5 années à se former.

  6. Annie

    Bonjour Caro
    J’habite à Cologne et j’aimerais comme toi donner des cours de français mais je ne sais pas comment faire . Pourrais tu stp me renseigner sur ce sujet ? Merci d’avance

  7. Annie

    J’aimerais être renseigné notamment sur les écoles où je dois m’inscrire

  8. cathy

    bonsoir Caro,
    depuis un mois j’essaie de trouver des élèves pour enseigner la langue française en freelance. Je commençais à penser que ce n’était peut être pas fait pour moi car je n’ai pas de diplôme d’enseignante. Et maintenant que j’ai lu ton blog , tu m’as redonné confiance. C’est au Moyen Orient que je voudrais partager mon savoir sur notre belle langue. Comment procéderais tu???

  9. Gilbert

    Bonjour Caro, je suis retraité français habitant actuellement en France et ton blog me donne un grand espoir de pouvoir vivre de ma passion qui est de vivre en Allemagne tout en donnant des cours de français à des particuliers. Je n’ai pas aimé les commentaires de ceux qui, fiers de leurs beaux diplômes obtenus suite à leurs ombreuses années d’étude en France pour pouvoir enseigner le français langue étrangère. Ça me fait penser à mes professeurs d’anglais et d’espagnol qui m’ont enseigné pendant 7 ans pour l’anglais et 1 an pour l’espagnol qui m’ont permis d’avoir de bonnes notes à tous mes examens mais qui ne m’ont aucunement aidé à pouvoir m’exprimer les premières fois où je me suis retrouvé face à des natifs anglais et espagnols. Par exemple, après mes centaines d’heures de cours d’anglais, j’ai été incapable de commander une bière dans un pub de Londres. Heureusement que le serveur était français.

Ajouter un commentaire